Le Syndicat des fabricants d’explosifs de pyrotechnie et d’artifice (SFEPA) et les principales entreprises du secteur contestent l’exception alsacienne en matière d’utilisation de pétards. L’arrêté commun pris par les préfets du Bas-Rhin et du Haut-Rhin le 13 septembre dernier fait l’objet d’un recours devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Les industriels des pétards et feux d’artifice rappellent que leurs engins bénéficient tous d’une autorisation de mise sur le marché. Photo archives DNA
Pour les artificiers et les industriels du secteur, les festivités de la Saint-Sylvestre en Alsace représentent traditionnellement une part importante de leur chiffre d’affaires. C’est d’ailleurs, en termes d’activité, l’un des deux temps forts de l’année avec le 14 juillet. La profession voit donc d’un mauvais œil les initiatives prises depuis quelques années par les autorités locales pour restreindre la vente et l’usage des pétards et des feux d’artifice (voir en encadré).
« Il s’agit d’une entrave à la liberté du commerce »
« Dans une région où en fin d’année les artifices sont une tradition ancestrale, les deux préfets du Haut-Rhin et du Bas-Rhin ont décidé tout simplement d’en interdire la vente et d’en réduire à néant le droit à l’utilisation », peut-on lire dans un document diffusé au sein de la profession. « Il s’agit clairement d’une entrave à la liberté du commerce, explique Marie-Agnès Couble, directrice commerciale de la société Ardi, basée à Garchy, dans la Nièvre, l’un des leaders français en matière de pyrotechnie. Nous considérons que la même réglementation doit s’appliquer sur l’ensemble du territoire parce qu’elle marche partout. Nous, les professionnels, nous payons des polices d’assurance extraordinairement élevées pour qu’en cas d’accident, on puisse faire jouer notre responsabilité. Or nous n’avons jamais été saisis pour une victime alsacienne. »
Les industriels des pétards et feux d’artifice aiment à rappeler que leurs engins bénéficient tous d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par le ministre en charge de la sécurité industrielle, obtenue suite à des tests stricts réalisés dans des laboratoires agréés par l’Etat. Ce qui pose la question des artifices qui passent clandestinement la frontière : « En Allemagne, le mode d’emploi n’est pas obligatoire, à la différence de ce qui se fait chez nous », précise Marie-Agnès Couble. Sans compter que les arrêtés critiqués « favorisent les commerçants d’outre-Rhin [et des départements voisins] ». « Avec ces mesures, poursuit-elle, certains commerçants de Strasbourg et Colmar sont traités comme des hors-la-loi en puissance. »
Déboutés par le juge des référés
Pour les grossistes comme Ardi, la décision des préfets alsaciens entraîne un gonflement des stocks. « Après l’annulation du précédent arrêté du préfet du Bas-Rhin, certains commerçants nous ont passé de grosses commandes, indique la directrice commerciale. Or il faut généralement six ou sept mois pour faire venir les marchandises d’Asie. Nous avons approvisionné la marchandise, mais nous ne pourrons livrer qu’une petite partie de la commande : nous ne livrerons pas les produits visés par l’interdiction. »
D’où un substantiel manque à gagner.
Dans leur combat contre l’administration, les professionnels du secteur et leur syndicat, le SFEPA, ont attaqué le 8 novembre dernier l’arrêté commun pris par les deux préfets, sur la base de deux recours. Le recours pour excès de pouvoir qui vise une atteinte à une liberté fondamentale – la liberté du commerce – n’a pas encore été tranché par le tribunal administratif de Strasbourg. Le juge des référés de cette même juridiction a quant à lui débouté les requérants dans une ordonnance du 28 novembre, au motif que l’urgence liée à un éventuel préjudice économique n’était pas caractérisée.
« Le juge des référés a validé la décision du préfet, souligne Christian Riguet, secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin. En droit, il aurait tout à fait pu suspendre les effets de l’arrêté jusqu’à la décision au fond. » Le fonctionnaire se veut optimiste pour la suite de la procédure. « L’arrêté du 13 septembre ne constitue pas une atteinte à une liberté fondamentale mais une restriction à la liberté du commerce prise dans un but d’intérêt général, rappelle Christian Riguet. D’une part, il s’agit de limiter les risques liés à l’utilisation non professionnelle de matériels dangereux, et d’autre part de réserver les engins les plus dangereux aux professionnels. Les professionnels ne sont donc pas mis en cause par cet arrêté, bien au contraire. »
Antoine Bonin
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