Pensez-y, en levant les yeux au ciel pour admirer le feu d’artifice du 14-Juillet. Ces explosions de couleurs, de formes et de sons, aussi impressionnantes soient-elles dans la nuit noire, résultent exactement du même processus que ceux à l’œuvre lorsque vous faites griller une saucisse au barbecue ou que vous mangez un hot-dog.
Le combustible ? Du charbon
Ce parallèle amusant est fait par Adam Cole, petit génie de la vulgarisation scientifique qui distille des vidéos aussi amusantes qu’instructives
sur sa chaîne YouTube, Skunk Bear. « Si j’ouvre un de ces explosifs utilisés lors d’un feu d’artifice, je trouverai plein de substances chimiques intéressantes, à commencer par le combustible : de la poudre de charbon », raconte l’Américain.
Or cette poudre noire est exactement de la même composition que le charbon de bois qu’on utilise pour allumer un barbecue. Ce charbon de bois « est principalement composé d’atomes de carbone, poursuit Adam Cole. Quand on y met le feu, ces atomes de carbone se combinent avec de l’oxygène contenu dans l’air, pour former du dioxyde de carbone. Cette réaction chimique libère alors de l’énergie sous forme de chaleur et de lumière. »
Adam Cole va plus loin en rappelant que cette poudre noire présente dans un produit pyrotechnique contient presque exactement la même quantité d’énergie contenue dans un simple hot-dog. « Comme le charbon, un hot-dog est composé d’atomes de carbone, détaille le scientifique. Votre corps utilise alors le même processus chimique à l’œuvre dans un feu d’artifice pour digérer et capturer l’énergie contenue dans le hot-dog. Il faut toujours de l’oxygène, l’air que vous inspirez, et, à l’issue, vous rejetez du CO2. »
Beaucoup, beaucoup d’oxygène
Mais alors pourquoi le charbon de bois se contente de se consumer sur place quand un feu d’artifice explose avec fracas dans le ciel ? Tout se joue dans la quantité d’oxygène qu’on fait entrer dans l’équation, répond Adam Cole. « Cessez d’alimenter votre barbecue en oxygène et la réaction chimique cessera, ajoutez de l’oxygène et la réaction s’accélérera », et le feu repartira de plus belle.
Pour obtenir une explosion semblable à celle qu’on peut voir dans un feu d’artifice, il faut ajouter beaucoup d’atomes d’oxygène. Plus qu’il y en a dans l’air. Pour se faire, on utilise du nitrate de potassium qui, mélangé au charbon de bois en poudre, explosera sous l’effet de la chaleur. Jonas Bidault, chef de production au
Groupe F, qui orchestre des spectacles pyrotechniques,
notamment cet été au Château de Versailles, ajoute tout de même un dernier élément « pour être complet ». « Il faut un support de combustion pour faciliter la réaction chimique, précise-t-il. Il s’agit le plus souvent d’une mèche textile intégrée à l’explosif et qui se consumera jusqu’à atteindre le cœur du dispositif. » Autrement dit la poudre noire.
Une charge d’élévation pour pousser le projectile dans les airs
Voilà donc la réaction chimique à l’œuvre dans un feu d’artifice. « Chose étonnante, le système de base a peu varié de celui ramené en Europe par Marco Polo au retour de son premier voyage en Chine [à la fin du 13e siècle] », reprend Jonas Bidault.
On sait donc comment un feu d’artifice explose dans le ciel, mais pas encore pourquoi certains explosifs montent plus haut que d’autres et pourquoi les couleurs diffèrent ? Pour la première question, Jonas Bidault explique que la hauteur dépend de la charge d’élévation embarquée dans l’explosif. « Cette charge est celle qui va exploser la première et pousser le projectile dans les airs avant que ce dernier n’ouvre. Cette charge d’élévation déterminera la hauteur et la vitesse du produit. » Plus elle est importante et plus le projectile ira haut.
Ajoutez des sels métalliques pour les effets couleurs
Et pour avoir des effets couleur ? « C’est l’ajout de sels métalliques à l’intérieur de l’explosif qui permettra de l’obtenir, poursuit Jonas Bidault. Lorsque la poudre noire va brûler, elle prendra la couleur du métal qui lui a été associé. » Certains métaux correspondent ainsi à des couleurs spécifiques : on utilise du chlorure de cuivre pour du bleu, du potassium pour du violet, du sodium pour du jaune, du baryum pour du vert, du strontium pour du rouge, du magnésium ou de l’aluminium pour du blanc…
En tant que designer de spectacle pyrotechnique, Jonas Bidault assure avoir à disposition une palette de couleurs importantes. « C’est le travail des fabricants de produits pyrotechniques, précise-t-il. Ils peuvent nous proposer une quinzaine de couleurs différentes, voire aujourd’hui des variantes d’une même couleur. En jouant sur les dosages, un de nos fabricants en Espagne peut nous procurer jusqu’à quatre blancs différents. »
La pyrotechnie ne progresse pas seulement sur les couleurs d’ailleurs. « La technologie et les tests en laboratoire ont permis plusieurs avancées, reprend Jonas Bidault. On est capable de créer des effets sans fumée par exemple ou des effets avec zéro retombé. L’intégralité du produit se consume alors pendant l’élévation. »